L’arrivée de la gauche va-t-elle changer la donne ?

Avec l’élection de François Hollande et un hémicycle acquis au pouvoir, les socialistes qui se sont régulièrement opposés à la réglementation de 2010 concernant les jeux en ligne vont-ils bouleverser la loi ? Deux points semblent particulièrement les intéresser : la règlementation des sites en ligne via l’ARJEL et la taxation des joueurs de poker.

Lors de l’adoption de la loi de 2010 sur la régularisation des jeux d’argent et de hasard en ligne qui a ensuite donné naissance à l’ARJEL (Autorité de régulation des jeux en ligne), les socialistes étaient plutôt contre et ont tenté de faire passer de multiples amendements pour l’affaiblir. Pourtant, cette loi a été et est toujours plutôt décriée dans le milieu car elle cloisonne le marché, encadre fortement les sites et taxe de manière importante les salles de poker. Elle n’est pas vraiment ce qu’on a fait de plus libéral ! Mais il est vrai que des proches de Nicolas Sarkozy se sont retrouvés à la tête de sites de poker en ligne et la Gauche a pu prendre ça comme un nouveau coup de politique-business.

Quoi qu’il en soit, la loi a le mérite d’exister, contrairement à certains pays, et de protéger un minima les joueurs. De plus, la taxation à la base des jeux rapporte une somme non négligeable à l’Etat et en ces temps de crise il n’est surement pas dans ses priorités de s’en séparer. Par contre, il était question d’une évolution de la base de cette taxation. Actuellement, les salles de poker sont taxées à partir de la mise des joueurs et il était envisagé de passer à une taxation sur le PBJ (produit brut des jeux), c’est-à-dire la différence entre les mises et les gains des joueurs. Cette nouvelle assiette était demandée par les sites de jeux en ligne qui se sentent asphyxiés par la taxation actuelle et risquent pour certains de ne pas pouvoir continuer à exercer. Cette évolution risque de passer aux oubliettes.

La socialiste Aurélie Filippetti (actuelle Ministre de la Culture) a beaucoup travaillé sur les questions des jeux en ligne. Elle avait remis un rapport de 185 pages rédigé avec l’UMP Jean-François Lamour il y un an et a été à l’origine de plusieurs demandes d’amendement dont un a fait couler beaucoup d’encre. Il s’agissait de taxer les joueurs professionnels dont les bénéfices annuels étaient supérieurs à 5 000 €. Cet amendement a été rejeté en décembre 2011 mais il pose un vrai problème : le statut et l’imposition des joueurs. Le poker étant considéré comme un jeu de hasard, les gains qu’on peut en tirer ne sont en principe pas imposables (comme les gains du loto ou de paris sportifs), l’Etat exerçant un prélèvement à la base. Mais l’Etat se penche de plus en plus sur le cas des joueurs professionnels gagnant des sommes importantes et considère que le hasard est fortement diminué par l’aspect professionnel, expérimenté et répétitif du jeu. Le cas PETIT jugé au Tribunal de Commerce de Clermont-Ferrand en octobre 2010 fait jurisprudence en ce domaine. Les joueurs professionnels doivent donc payer des impôts au titre des BNC (bénéfices non commerciaux), c’est pourquoi un certain nombre de pros français se sont domiciliés à l’étranger…

La priorité du gouvernement actuel n’est vraiment pas de modifier la réglementation du poker, mais cette question viendra en son temps à l’ordre du jour. Le statut des joueurs professionnels de poker lui devra par contre être clarifié pour éviter des traitements différents selon les interprétations possibles.